Presse

Les peintres à suivre

Le soleil couchant reflété sur une mosaïque vénitienne peut-il écrire un pan de l’histoire de l’homme ; Pour François Priser, la peinture actuelle doit révéler dans sa structure même la trace des élans du passé. Elle doit chercher l’homme et son histoire à travers les essais et les transformations. Chercher l’étonnement dans la rigueur d’une conception que la mise en scène portera dans un autre domaine du regard…

Priser provoque le regard en l’invitant par la grâce de l’élégance, à changer de point de vue. Il rêve comme Eischer de renverser l’ordre apparent du monde, mais il aime, comme un Doge de la Sérénissime, manipuler les choses pour qu’elles fussent belles à appréhender.
Entre la rigueur de l’architecte épris d’ordre et de liberté, la folie du poète qui rêve sur un reflet, il y aura la lutte des apparences : la déchirure, l’exploration alors systématiques et pourtant aventureuses des couches superposées, la révélation de l’autre surface des choses. Qu’importe les recettes : Priser, engagé dans cette matière vive appelée peinture, lancé dans cette quête de l’homme à travers ses avatars - ses épopées et ses dépressions, semé à analyser les germes découverts dans les ruines. Il en fait naître des images et des émotions, des chaleurs et des architectures improbables et définitives - parce ce que l’on sent, parce que l’on sait en les découvrant qu’elles ne pourront passer.

Le passé réécrit par François Priser ne passera pas parce ce que l’œuvre pétrie de la terre de l’homme, enclose dans l’imaginaire et ouverte sur la rigueur de la pensée touche à la fois le cœur et la raison. Parce qu’elle porte en elle une évidence irrépressible. Parce qu’elle est matière et lumière, chaleur et théâtre. Parce qu’elle est source de vie.

Roger Balavoine / Eighty n°14 / 1986

La Nuit Vaincue

Savoir que François Priser a d’abord été séduit par l’art de la mosaïque aide à pénétrer l’étrange construction que sa geste inscrit dans l’espace. Cette peinture, toute en émotion, s’ouvre à nous comme une écriture échappée au vertige du temps. L’absence de l’être y joue sur les fragments cristallisés de ce qu’il fut. La transmutation s’accomplit par une lente abolition de la couleur. Prise efface Priser et c’est justement là qu’il se révèle, à la fois subtil et puissant.

La toile est un domaine hanté, un dallage déserté que des béances noires incisent. On songe aux images raturées des tout débuts du cinéma. Les ténèbres sont là qui cherchent à propager l’arrogance de leur empire, prêtes à tout subvertir. C’est alors que l’inversion s’accomplit. La lumière peu à peu s’installe, insufflant à l’opacité le souvenir et la promesse d’une profondeur. L’évasion vient de l’intérieur, du plus lointain de la mémoire, esquissant d’imprévus paysages, appelant une relecture en abîme sur l’océan du carrelage.

Les vitres s’allument et les visions de terres traversées viennent irriguer les yeux de leurs reflets épars. C’est la nuit de Saint Jean de la Croix succombant au chant d’une source. La froideur se métamorphose et le tableau se multiplie sous la poussée des éléments. Le pavement devient vitrail.

L’Affiche / 1986

Une œuvre s’installe

L’investigation a son mystère : Priser peint en semant des questions plus que des doutes, des émotions plus que des évidences.
C’est une peinture d’architecte du passé possible. Une enquête sur les traces que les hommes laissent sur les sols qu’ils foulent, sur les murs qu’ils signent de graffitis. Tout arrive chez Priser comme l’émergence des données du passé. De la mosaïque romaine, des constructions d’Esher, des reflets du soleil du soir sur une fenêtre poussiéreuse ouverte sur le Grand Canal, le peintre ordonne des images, insuffle des idées, crée des forces flamboyantes.
Rien pourtant n’est facile dans cette quête qui exige la pratique de la fouille. L’archéologie actuelle de Priser peut partir d’un décor mauresque, d’une évocation byzantine, d’une Venise qui n’en finira jamais de mourir parce qu’elle est inscrite dans la mémoire de l’homme. Lancinante et ludique, la peinture de Priser s’affranchit des courants : pratiquant la déchirure après l’étagement de la peinture en couches successives, l’artiste, qui travaille sans filet au plus haut risque encouru, explore les traces du temps dans le jeu de l’ombre et de la lumière. Une peinture à lire en transparence, à explorer couche après couche, à y dénuder en prenant son temps : la logique de la construction, épaulée par le génie du hasard bien tempéré, ouvre des lignes de fuite. Le froid, le chaud, le pesant, le pesé, le lourd, l’intemporel, Priser traverses les évidences du souvenir pour en créer une action dramatique et charnelle. Cela fonctionne à partir de la mémoire ; cela se révèle dans la transparence de la matière, dans sa lourdeur aussi, puisque rien n’est établi d’avance que le désir de gratter l’évidence du réel pour laisser partir l’étoile filante de l’imaginaire.

Roger Balavoine / Centre d’Art Contemporain de Rouen

Galerie Arts Longa / Rouen

« Les « petits formats de F.Priser, présentés par Jean-Marc Jouveneau, constituent une intéressante gageure. Il n’est pas si facile pour un peintre habitué aux vastes surfaces à maîtriser sa facture sans rien perdre de son efficacité et de ses points de repère. Priser est intéressé par cette idée, il signe avec d’autant plus d’intérêt cette exposition qu’il réussit pleinement son pari : « faire grand sur de très petites surfaces ».

L’on retrouve de grandes constantes de l’œuvre de ce peintre qui a toujours tenu à rester un marginal de la vie artistique rouennaise. Créateur très concerné par la forme mystique d’un travail secret et méditatif, il privilégie le graphisme et la trace sans jamais délaisser l’une des principales caractéristiques de sa production, une palette élégante racée, toujours très peaufinée. Priser un méticuleux, un passionné, sans doute inquiet aussi, son art, il le crée loin de tous, dans le silence le plus total…il n’en fait que plus de bruit lors de ses expositions. »

Paris-Normandie / Novembre 1987

Une Lumière qui vient de Loin

« François Priser est de ces artistes qui entre deux expositions cultivent une rare discrétion. Le tapage, il le sait, n’est pas l’allié rêvé d’une recherche bien menée. C’est dans le silence retrouvé, le repli librement assumé qu’une œuvre a quelque chance d’atteindre sa pleine densité. L’inspiration, si le terme a encore un sens, s’accommode mal des ambitions sociales dont trop de peintres, hélas, font leur seul horizon ; la peinture de priser, à l’inverse, est toute d’intériorité.

Elle a l’austérité d’une cellule, de moine. Son langage semble échapper aux dernières séductions du jour, tant elle s’enracine dans les strates du temps pour y revisiter tout à loisir des images et des lieux que nous léguèrent les religions dont nous sommes nés. Mais les thèmes de l’artiste relèvent davantage du spirituel que du religieux au sens strict. « Ce qui m’importe dans la peinture, avoue Priser, c’est de montrer du temps, de donner à voir une mémoire ; Et cela passe nécessairement par la lumière et la matière »
De fait, les grandes toiles de priser, tout comme ses travaux sur papier, semblent éclairés de l’intérieur, comme si cette lumière minimale mais inextinguible, nous parvenait de loin, de très loin dans le temps ; Et l’on pense naturellement, à l’éclat obstiné des astres qui nous atteint tel un message avec un décalage vertigineux. Cette notion de vertige ou d’abîme n’est pas tout à fait étrangère au sentiment diffus mais persistant qu’évoque la peinture en question.

Ce « voyage qui, à l’origine, est né sur le support des pérégrinations réelles, entreprises à travers un espace culturel - celui des grands courants monothéistes - est désormais plus conceptualisé, donc moins sujet aux effusions.
Ceux qui craignaient de voir Priser répéter un système qu’il aurait lui-même généré (recours au papier goudronné, etc.) peuvent vérifier l’évolution sensible qu’il a pu accomplir en deux ans. L’arc a conquis sa place dans la grande mosaïque, les béances obscures se sont peu à peu estompées, la couleur demeure assourdie, mais le dessin reprend sa liberté foncière. Un univers intellectuel se reconstruit qui, sans renier ses fondements - une fascination pour pour l’art chrétien exempte de dogmatisme - passe par des voies hier encore imprévisibles.

Luis Porquet / L’Affiche de Haute Normandie / 1991

Entre les déchirures

« Priser se moque de la mode. Il a un pied dans l’art byzantin, et l’autre à Fécamp, où il a choisie vivre, un pied au-dessus d’une saurisserie. Un bout de temps, un bout de monde. Entre deux, il déploie un vulgaire « papier goudron papier armé à usage maritime », deux feuilles kraft emprisonnant du goudron, Du goudron ! Avec ça, il va faire une « toile », un « tableau » un « priser », qui est un lieu, c’est-à-dire un morceau d’espace (1 m sur 2 m) approprié. Un lieu habité, déchiré, décoré, il en a vu des choses, le temps l’a façonné. Priser fait le temps dans cet espace ;
On ne voit pas un tableau de Priser, on ne voit pas dans le temps. Dans l’épaisseur du temps. Pour y entrer, rien de tel qu’un film.

Voici Priser qui, sur son infâme goudron, dépose des kilos de peinture, par couches successives. Sédimentation. A chaque couche, il n’a qu’un but : enlever ce qu’il a déposé, à coup de buvard : il presse le buvard, ou le caresse simplement. Erosion.
Il reste toujours de la peinture, le temps ne défait jamais entièrement ce qu’il a fait. Mais le goudron est là : il émulsionne, il affleure. Surtout, il rayonne - goudron pur - dans des déchirures, dans la peinture-vestiges, qui a résisté au temps de PRISER, PRISER s’installe. Il va prendre son temps. Il peut vivre ici. Il décore tranquillement. Peintre maniériste. Travaillant du bout du pinceau, de deux bouts, coté poils comme côté manche. Il peint et il griffe. Il impose sa griffe. Signé PRISER.
On peut finir sur une musique douce : il y a de la paix entre les déchirures.

Joseph Périgot / Normandie terre des arts / 1993

Exposition théâtre du Rive Gauche / St-Étienne du Rouvray

François Priser fut l’incontestable coqueluche du milieu artistique rouennais des années 90. Son travail inspiré des architectures d’intérieur possédait un aspect magique qui fit merveille.

Après avoir pris son bâton de pèlerin ici et là en Europe, après avoir tâté de la scénographie théâtrale, il réapparait pour notre plus grand plaisir avec une nouvelle production. Ce peintre aux alchimies mystérieuses privilégie la virulence d’un dessin magistral, agitateur fécond d’une peinture qui retrouve avec chaleur les biens faits d’une figuration très active. Ce professionnel inquiet trouve refuge avec délices dans l’élaboration très recherchée de contes philosophiques.

Priser ne peint pas pour ne rien dire. Il prospecte les contrées lointaines d’un monde douloureux, dangereux, fascinant : le sien ; Cette soif de retrouver la prime beauté du dessin, désormais moteur de sa création, il la puise au contact d’une fine équipe avec notamment la complicité du graveur Philippe martin. Entre réalisme et poétique, cette exposition offre une excellente vision du monde intérieur de cet artiste puissamment…intimiste.

(…) Ses œuvres représentent une superposition de scènes aux perspectives disproportionnées, mêlant la nature, le personnage et le Temps. « Je me suis toujours intéressé à la notion de mauvais temps, on la retrouve dans plusieurs de mes œuvres ». Sur la plupart des toiles exposées, les nuages sont en effet très présents, dans une tourmente à la fois violente, douce et poétique. Parfois, un nu, avec une pointe d’érotisme apparaît comme en filigrane. Le créateur expose également une série d’estampes réalisées ces dernières années.

Rémi Parment / Paris-Normandie / 2004

Priser et sa descente dans l’inconnu de la Renaissance

(…) Cet homme de grande culture enseigne la peinture et travaille aussi bien à l’écriture qu’à des travaux de scénographie pour le théâtre. Mais c’est avant tout dans son œuvre de peintre qu’il recherche inlassablement les rapports entre le temps, la lumière, l’espace, la matière et l’histoire de l’art elle-même. Après une période abstraite très féconde, saluée par le public et la critique, cet artiste grave et brillant, est revenu, grâce à un graphisme nerveux et inspiré, à des compositions plus claires et narratives oscillant entre poésie et réalisme.

2005

Priser à la galerie Laurent

(…) Ses expositions sont nombreuses, à Paris et en province, mais la galerie PR Laurent lui offre un cadre, à la fois prestigieux, accueillant et original où ses œuvres s’intègrent avec justesse. D’abord, cet artiste possède un beau sens du phénoménal, et en peinture, ce n’est pas l’évidence. Puis la matière très importante impose une géométrie régulière de composition, où alternent de multiples carreaux, modulés par quelques élans gestuels et vivants qui aèrent la rigueur d’un style profondément marqué par le classicisme. Car, du style, il y en a, issu de la régularité du motif et de la brûlante vivante ou sereine multiplicité des couleurs. Ainsi, François Priser crée-t-il un cheminement plastique, lyrique et mystique, fait d’étrange, de réflexion, et de gravité, au sein duquel jouent les vagues et le réalisme du rêve et de la pensée.

André Ruellan

Priser : grande suite pour la lumière

Les toiles récentes qu’il expose révèlent l’arrivée de l’anecdote et celle d’une dimension métaphysique attendue mais latente jusqu’à présent. Il approfondit sa manière de peindre, va chercher au fond même de la matière l’énergie lumière qui ne semble plus provenir uniquement des paysages toscans, des venises qu’il porte au cœur. « Si je pouvais prier un jour, je ne peindrais pas ». Ces toiles ont quelque chose de la prière, parce qu’elles transmettent bien plus qu’un message, un pouvoir d’expression qu’on n’a pas besoin d’analyser pour en ressentir l’émotion. L’émoi est là, transporté par une construction rigoureuse et pourtant inventive, par une harmonie basée sur des lumières vénitiennes, sur des reflets de mosaïques, de pavages qui portent la trace du passé. Priser n’a plus besoin de ces traces pour s’exprimer. D’un voyage à Barcelone, il rapporte un goût baroque pour célébrer gaudi ; de la Colombie, il a saisi les émois sensuels que la foi du cœur traduit.
L’œil, ici, s’anime. Le système n’en n’est plus un : tout au plus devient-il une écriture, un style. Voici que l’œuvre de priser, dont on sait qu’elle appartient à celles qui demeureront quand on aura oublié tout le reste, voici que cette œuvre, à la fois secrète et révélée, s’anime dans sa globalité. Elle signifie sans mode d’emploi, par la vertu de sa densité, par son élan initial.
Elle apporte une autre lumière : les mosaïques qui en forment toujours la trame apparaissent comme des vitres qui ont capté la lueur jaune du soleil : là encore, il marque le temps dans la durée d’une seule journée ; La matière de peinture engendre des ondes porteuses qui fomentent cette émotion sans laquelle aucune peinture ne peut accéder à la vie. Priser, en prise directe sur la vie, efface par sa foi toute tentative d’explication ; Le mode d’emploi n’a plus cours. Il suffit de faire silence et d’écouter… Ça peut durer très très longtemps : la résonance n’a plus de fin…

Exposition à l’Espace d’Art contemporain de Rouen / Novembre 1987

Introduction C. Dorval et G. Manchevelle

« Il n’y a qu’un malentendu mais nous en mourrons » F. Kafka

De fait, sur le papier, il y a déjà une peinture excessivement trompeuse. Apparence/Illusion. Qui est mort/Qui est vivant. Les hautes falaises d’Etretat occupent notre silence. Le travail se répète dans l’exactitude du moindre détail enfermant des traces essentielles dans quelques rythmes linéaires qui rejoignent la ligne continue que la main de Giotto traça sur les murailles pour conduire ceux qui viendraient les mains jetées en croix. Surface après surface, François Priser désordonne la mort, la ligne droite, le carré, pressé qu’il est par l’imposture première qu’est la mort du sujet. Le pavement de l’absence c’est lui. Sa toile est comme une peau qui affirme l’illusion de l’apparence par un matériau qui n’a rien de noble. C’est ici que François franciscain évoque par la pauvreté des moyens utilisés, la renaissance. Hors cadre, légèrement penché, la tête inclinée, Priser peint. Lentement ses couleurs deviennent transparentes au blanc de la toile, chair dans laquelle il trace, grille, déchire, nous plongeant dans le malentendu d’un corps tantôt ressuscité et tantôt cloué à un arbre mort.
Maître seul de la laideur, l’homme, F.P, est disponible à ce qui ne sert à rien et s’il se mesure à l’élément trivial du réel, au vulgaire de la vie, à ce qui goudronne l’intérieur, c’est que, « incapable de peindre », il peint, veillant sans cesse du dedans vers le dehors. Comme le souligne Jacques Henric dans « La Peinture et le Mal » au sujet de Mondrian : « Chaque ligne noire est une ombre déchirée qui ouvre aux yeux le plus-de-lumière dont nous nous traversons pour faire résistance ». Les lignes noires de Priser nous traversent aux points de suture de la peinture avec le corps. Jean-Marie Tiedey. Catalogue Regard sur la création contemporaine. Espace Culturel de Saint-Germain des Angles.

Introduction C. Dorval et G. Manchevelle / 1988
Artension n° 7, 1988 (Galerie Ars Longa  Rouen)

Exposition Galerie CB2 / Rouen

Belle exposition, avec un François Priser tout en charme et en réflexion grâce à sa trentaine de peintures récentes. Sous un thème différent du centre d’Art Contemporain où il expose actuellement, se déploient néanmoins la manière, la matière, et l’impact de cette personnalité bien marquée. Le papier goudronné et sa structure géométrique y jouent également son rôle audacieux, mais l’expression et la motivation exprimant un dynamisme chaleureux d’où s’exalte une luminosité précieuse et raffinés au sein d’élans graphiques d’un bel équilibre gestuel, étonnamment attachant et superbement étudié. 

Février 1991

Exposition collective 24 peintres pour un été

(…) François Priser justifie ses choix, sa vision de la peinture et revendique une certaine honnêteté ; Une franchise qu’il s’efforce d’expliquer par son rôle d’artiste ; « peindre, c’est entreprendre une conversation. On fait certaines choses, la toile dit des choses, mais toujours pour quelqu’un ; » Une personne lambda, même imaginaire, peu importe ; le primordial, le crucial, c’est de donner quelque chose à penser, même à méditer. »

2000

Priser, peintre du temps

(…) « Entré dans les collections du FRAC de Haute-Normandie, Priser est sans doute l’un des meilleurs espoirs de la jeune peinture actuelle. L’intérêt passionné qu’il porte à l’histoire de l’art et sa fine culture littéraire sont les éléments nourriciers de son processus créateur. Son œuvres se construit sur les traces revisitées d’un passé fort lointain : les civilisations étrusques, grecques, romaines et chrétiennes forment le socle sur lequel il travaille depuis quatre ou cinq ans.
Sur la base archéologiques de ces multiples territoires où des hommes vécurent et inventèrent leurs propres rêves, il fait éclore un univers en y mêlant des sédiments de son existence personnelle : passions, obsessions, désirs qui rencontrent aussi ceux de l’homme universel. Son nouveau thème de référence est le « banquet », qu’il aborde de façon symboliste.
« Je crois à la fonction contemplative de la peinture » dit-il. « Le lit, la table, le vin, la morts, sont des éléments primordiaux sur lesquels je construis mon œuvre ».
Priser travaille souvent dans de très grands formats où s’affrontent présent et passé. Le Temps, le Silence, le Recueillement font partie intégrante de sa quête. Ils en constituent la substance tout autant que la matière de ses toiles. «  C’est par leur vive altération que les vestiges nous touchent » observe-t-il encore, « c’est elle qui en fait la beauté ». Ce constat met en jeu toute une philosophie de l’art …

O. Gracia / Maisons Normandes / Normandy Mansions. n°13 / 1992

Exposition abbaye de St-Martin de Bocherville

(…) Rapidement reconnu comme l’un des meilleurs espoirs de la jeune peinture actuelle, F. Priser est entré dans de nombreuses collections privées et publiques. Il conçoit aujourd’hui sa peinture comme des contes philosophiques en jouant notamment avec les métaphores et les paraboles. Il joue avec la peinture pour « citer » ou raconter des histoires avec des allusions qui ont pour but d’accélérer le processus métaphorique. Il puise son imaginaire picturale empreint de références à l’histoire de l’activité humaine, dans la philosophie et la littérature. Le thème du Temps est omniprésent dans l’œuvre de François Priser, thème qu’il traite par des jeux de lumière, de matière, de transparence. Bien que sa peinture soit l’illustration d’un concept philosophique, il ne s’agit pour autant pas d’une peinture savante. Elle reste facile à décrypter sans être figé dans un style abstrait ou figuratif : sa peinture joue au-delà. Les œuvres exposées sont toutes des toiles récentes et rendent hommage au peintre Poussin avec un déchaînement des éléments naturels où dominent le déluge et l’orage.

L’Humour et l’élégance

Superbe ensemble à la galerie de l’Orangerie pour ces rencontres 2005, il réunit six artistes de forte personnalité dont François Priser au meilleur de sa forme. Ce peintre qui aime à triturer avec passion des tons ocre, rouge et bleu, use d’une écriture qui va droit au cœur. Une élégance naturelle…

Rémi Parment / 2005

D. Arnaudet dans l’ouvrage consacré à la Collection Jean-Jacques Lesgourgues


François Priser est un homme de patience et de sagesse, de capture et de ruse. Ce guetteur éveillé accoutume obstinément son regard à la part obscure du temps, celle aveuglante de l’Histoire, débusque les ombres, les traces, les réminiscences et les mobilise avec une élégance savante, efficace : métier d’équilibre et d’audace, ouvrage de recentrement et de mémoire.
L’importance de sa peinture ne se mesure pas à son étendue mais à sa profondeur. Tout est mouvement, trame et songe : il s’agit de recueillir les images et de les raconter, c’est-à-dire d’être attentif à ce qui se passe entre émerveillement et effacement, connaissance et interrogation.

Didier Arnaudet dans l’ouvrage consacré à la Collection Jean-Jacques Lesgourgues / 2011

Entre les déchirures, l’épaisseur du temps 

Priser se moque de la mode. Il a un pied dans l’art byzantin, et l’autre à Fécamp où il a choisi de vivre, dans une ancienne saurisserie. Un bout du temps, un bout du monde. Entre deux, il déploie un vulgaire « papier goudron armé à usage maritime, deux feuilles de papiers kraft emprisonnant du goudron. (…) On ne voit pas un tableau de priser, si on ne le voit pas dans le temps. Dans l’épaisseur du temps. Pour y entrer, rien de tel qu’un film. Voici Priser, qui sur son infâme goudron, dépose des kilos de peinture, par couches successives. Sédimentations. À chaque couche, il n’a qu’un but : enlever ce qu’il a déposé, à coups de buvard. Il presse le buvard, ou le caresse simplement. Érosion. Il reste toujours de la peinture. Le temps ne défait jamais entièrement ce qu’il fait. Mais le goudron est là, il émulsionne, il affleure. Surtout, il rayonne, goudron pur, dans les déchirures, qui ont échappé à la sédimentation-érosion, qui n’a jamais connu la moindre goutte de peinture, et qui sont inquiétantes, lourdes de sens….

Joseph Périgot  / Introduction au film : Priser entre les déchirures / 1986

Frac Haute-Normandie

(…) Sensible à la profondeur du temps il travaille les matières (acrylique, huile, tempera, goudron) par stratification entre sédimentation, érosion, déchirures, scories, déchets et impressions. À ce travail il associe des voyages, des ailleurs où sa peinture se prépare, s’esquisse, se poursuit. L’artiste aime à explorer le temps et l’espace. IL marche, prend des notes, détourne, interroge les malentendus. Venise, Florence, Madrid sont pour lui des lieux d’investigation nécessaires. Retournant aux sources il observe avec acuité la lumières, les sites, les couleurs, les matières, l’architecture. Tous ces éléments complices des écritures, des littératures, des histoires, des matériaux, intégrés à une technique très élaborée, font que sa peinture n’est pas loin d’être une architecture du paysage et donne à voir une œuvre où les effets de vibration l’ont progressivement emporté sur le matiérisme des premières toiles.

J.M Thieday / Une collection pour une région. FRAC Haute-Normandie / 2002

Rétrospective, Maison des architectes

François Priser est peintre et scénographe. Il expose en France et à l’étranger depuis les années soixante-dix. D’abord plus ou moins justement apparentée au mouvement Support-Surface, sa peinture se détourne des partis-pris et des fausses querelles entre abstraction et figuration pour bâtir une œuvre singulière qui révèle une dimension à la fois poétique et philosophique, simple et savante, dont le thème récurrent est le Temps. Temps qu’il met en scène et dont il fait son petit théâtre en flamme, une fable existentielle, un conte philosophique, une énigme qui n’exclue ni le rêve ni la cruauté ni la raillerie tel qu’en parle Büchner…
(…) Cette confrontation radicale entre deux périodes distinctes, contraires à la logique rétrospective, était une volonté commune de Patrick Vettier, président de la Maison des Architectes et de François Priser. Elle apporte en e.et un éclairage nouveau sur l’œuvre et le parcours du peintre et elle oblige le spectateur à des associations, des analogies et des comparaisons inhabituelles (…). Livrées aux comparaisons, ces deux périodes distinctes révèlent, notamment, un point commun essentiel : l’usage du goudron. Si François Priser utilise le goudron à partir de 1984 jusqu’en 1995, il le réemploi de façon quasi systématique dans les œuvres récentes visibles ici.Dans les années 80, comme on le voit dans certains tableaux exposés, le goudron est utilisé comme support, comme matière et aussi comme couleur. Ces toiles sont généralement des créations réalisées au cours ou suite à des voyages. Elles sont généralement tramées ou mosaïquées, sont marquées d’une très grande rigueur compositionnelle, abstraite, souvent géométrique, parfois décoratives et qui rappellent par certains aspects les travaux des artistes liés à Support-Surface ou assimilés, comme Marc Devade, Pincemin ou François Rouan. Son goût pour l’architecture y est omniprésent, en particulier les ornementations comme les carrelages, les pavements, les azulejos, etc. Dans les œuvres récentes le goudron est utilisé à des .ns essentiellement graphiques et dans un esprit plus figural. Au lieu que la couleur soit déposée dans le goudron et le motif gravé dans le support, c’est le goudron qui est « imprimé » sur la couleur, dessinant un troublant motif sur le motif. De ce fait, les grandes toiles actuelles, François Priser les appellent ses « grands monotypes au goudron » parce qu’ils s’apparentent selon lui à la gravure autant qu’à la peinture.
(…) La peinture de François Priser est une peinture difficilement classable, elle n’appartient à aucune école, à aucun genre et on aurait tort de s’en plaindre. N’étant jamais soumise à la nostalgie, pas plus qu’elle n’est soumise aux modes, elle préserve sa singularité et sa souveraineté en se jouant des genres et des conventions. Il est peu d’œuvres dont on peut dire si naturellement dans un même souffle qu’elle est à la fois classique et contemporaine. Son intemporalité est même saisissante et c’est le moins qu’on puisse penser s’agissant d’une œuvre dont le thème central est précisément le Temps. Quoiqu’il en soit, si François Priser passe pour un lettré, sa peinture a le bon goût de n’en rien montrer. Elle a de l’esprit et de l’élégance, et c’est assez. Débarrassée de toute affèterie et symbolique cette œuvre est une œuvre ouverte à toutes les intelligences, à tous les imaginaires… Chaque œuvre est un conte poétique ou philosophique, parfois sarcastique, parfois drolatique, parfois tragique qui exige à qui veut bien s’éperdre encore un peu, la volonté de lier la pensée à la contemplation, la maîtrise à l’émotion.

Philippe Priol / Introduction à l’exposition F.Priser, Maison des Architectes, Poitiers / 2003

Classique !

Reconnu comme une figure singulière de la scène artistique française, François Priser n’a cessé de montrer tout au long de ses bientôt cinquante ans de carrière son étonnante faculté de se réinventer et sa volonté d’élargir et d’approfondir une œuvre protéiforme qui lui est propre et qui échappe quelque peu aux critères d’évaluation et de classification en usage. Depuis les années 80 il revendique une rupture définitive avec la distinction abstraction / figuration sous l’influence assumée d’artistes comme Sigmar Polke et Gerhard Richter mais aussi de ses nombreux amis peintres espagnols qui pour la plupart vivaient en France et produisaient déjà des œuvres plus libérées des clivages dogmatiques qui sévissaient alors dans le microcosme artistique parisien de l’époque. Il tient d’ailleurs de ces derniers le goût des surfaces généreusement texturées. Né en 1954 à Yvetôt en Haute-Normandie («qui vaut Constantinople» sic Flaubert)François Priser est peintre mais aussi écrivain et scénographe. Son œuvre, marquée par les notions de Temps et de Métamorphose, est imprégnée de littérature et de philosophie mais c’est toujours sans ostentation, avec élégance et simplicité que le peintre convoque à sa table des opérations la tradition de l’histoire de la peinture. Aussi savantes que puissent être les premières intentions de l’artiste, il n’en revendique pas moins le caractère empirique et analogique de ses créations. De fait, le plaisir « musculaire » de peindre, de fabriquer, de jouer des hasards et des nécessités, de cultiver l’accident, d’allier la gravité à la fantaisie, la maîtrise à l’abandon, d’entremêler sans tabou les genres et les styles, est parfaitement perceptible dans chacune de ses œuvres quoiqu’elles soient toujours d’une très grande rigueur compositionnelle, laquelle composition - ses principes, son histoire, son évolution, - reste une de ses préoccupations majeures et l’objet de ses recherches. Cette volonté de refuser tout style, de mélanger les genres, les références et les langages visuels, de jouer en permanence avec les oppositions et les contradictions (« l’oxymore comme arme de guerre » dit-il et prétend-il devoir au Maniérisme), ce refus apparent d’universalité, d’ordre esthétique et métaphysique, en ferait un artiste résolument post­moderne si, malgré toutes ces virevoltes l’œuvre dévoilait finalement depuis bientôt cinquante ans sa cohérence, sa poésie, sa musicalité (très française par ailleurs). Peut-être bien que son ambiguïté tient à sa cohérence. Ni moderne, ni post-moderne, peu importe puisqu’il se revendique classique.

E.Klausner / Expo galerie Médiart

Une figure singulière

Né en 1954 à Yvetôt en Haute-Normandie (« qui vaut bien Constantinople », sic Flaubert), François Priser est peintre mais aussi écrivain et scénographe.Reconnu comme une figure singulière de la scène artistique française, F.P n’a cessé de montrer tout au long de sa longue carrière, son étonnante faculté de se réinventer, souvent à contre-courant des modes et des systèmes, au point de créer une œuvre protéiforme qui lui est propre et qui échappe quelque peu aux paresseux critères d’évaluation et de classification toujours en usage, notamment en revendiquant depuis les années 80, une rupture définitive avec la distinction entre figuration et abstraction déjà entamée avec Sigmar Polke et Gerhard RIchter (…). Son œuvre, marquée par les notions de Temps et de Métamorphoses, est imprégnée de littérature et de philosophie mais c’est toujours sans ostentation, avec élégance, inventivité et même avec humour que le peintre convoque à sa table des opérations la grande tradition de la peinture. Au reste, aussi savantes que paraissent les intentions premières qui président à la création, Priser n’en revendique pas moins pour une part le caractère empirique de sa peinture comme en témoigne son goût à la fois savant et jubilatoire pour les matières vibratiles, subtiles, complexes et denses, goût qu’il a cultivé très tôt à la fréquentation de la peinture espagnole qu’il affectionne.

Alin Avila / L’art pense le monde à l’occasion de l’exposition Par dessus toute Chose / 2019
Galerie AREA Paris. Orangerie du Sénat, Parc du Luxembourg.

L’oxymore comme arme de guerre

(…) Cette volonté de refuser tout style, de mélanger les genres, les références et les langages visuels, de jouer en permanence avec les oppositions et les contradictions (« L’oxymore comme arme de guerre », dit-il et prétend t-il devoir au maniérisme), ce refus apparent d’universalité, d’ordre esthétique et métaphysique, en ferait un artiste résolument post-moderne si, malgré toutes ces virevoltes l’œuvre dévoilait finalement depuis bientôt cinquante ans sa cohérence, sa poésie, sa musicalité (très française par ailleurs). Ni moderne, ni post-moderne, peu importe puisqu’il se revendique classique.

Théodore Blaise / Introduction au catalogue. Exposition Priser au Sénat / 2019

Les jardins fortifés

Si l’air possède l’étrange pouvoir de résister à l’érosion, à la tentation de l’oubli, c’est qu’il a le privilège de mettre le temps en suspension, neutralisant par métaphores interposées ses effets les plus destructeurs. Car le temps est probablement notre problème existentiel majeur. Peu de peintres s’en déclarent plus conscients que François Priser.À telle enseigne qu’il en a fait l’un des ressorts de sa pratique. (…) Le temps de F.P est un temps différé, figuré, entre attente et mélancolie, entre annonce et dépossession. Le temps de F.P se joue entre absence et présence. Il est celui de la contemplation. C’est donc un temps métaphysique. (…) L’éphémère et l’intemporel sont logés à la même enseigne.L’éternité paraît cependant se porter du côté de l’impalpable, de l’élan furtif et fragile, courant en arabesques folles à l’assaut de la lumière, comme le font les convolvulacées. Le mouvement est ascendant et s’inspire de la spirale. Il est aspirant. (…) Le goudron nous ramène toujours à la grammaire du noir, à la béance et à l’énigme qui ont durablement marqué la peinture de Priser. Les plus anciennes des œuvres qu’il présente attestaient déjà d’un souci de se colleter au temps, aux traces causées par son passage, aux déchirures et aux blessures qu’il laisse en nous. L’artiste depuis lors a pris quelque recul, faisant surgir des éléments résolument liés aux sursauts permanents de la vie : végétation, bourrasques, .oraisons, nuées, orages. Au delà de la « gravité dont elles peuvent parasiter imprégnées, les toiles actuelles procèdent d’une attitudes plus distanciée où n’est pas sans entrer l’humour en même temps qu’une certaine causticité parfois. Elles laissent place, par ailleurs, à une plus grande sensualité. Inscrites dans un processus narratif qui apparente Priser à une manière de fabuliste, les peintures des dernières années présentent très fréquemment un caractère énigmatique. (…) D’avantage qu’aux symboles qu’il tient résolument à distance, Priser aurait plutôt recours à l’allégorie, aux paraboles, aux charades savantes, aux devinettes, dont les images prégnantes be cessent d’interroger nos sens et notre cœur. (…)

Luis Porquet / La Pierre, l’arbre et le vent. Les Jardins forti.és, Château du parc de Clères / 2006

Priser, peintre du devenir. 

Peindre est un acte qui engage. Sans doute est-ce là l’une des formes absolues de la vie créatrice à laquelle François Priser a d’emblée adhéré dès le plus jeune âge (…) Si toute œuvre, une fois achevée, s’enveloppe d’éternité, elle s’inscrit toutefois dans le temps très humain de l’artiste, celui qui lui est imparti pour vivre et pour créer. La toile se nourrit donc de ce paradoxe, à la fois tributaire d’un temps limité mais par ailleurs échappant à toute limite temporelle. François Priser, conscient de cette contrainte, qui est la perception toute philosophique de son existence, n’en abolit pas moins la limite pour naviguer dans un temps historique obéissant à ses fascinations propres. Le temps est donc sans mesure pour lui, car l’artiste lui appartient tout entier : soit il s’y promène pour en recueillir l’expérience, soit il y reconnaît ses racines. Elles émergent dans son œuvre propre. (…)

Philippe Priol / Parc de Clères. Les Jardins fortifiés / 2006

Les eaux, le vent, les heures

On composera. On composera avec l’eau et les nuages, avec les arbres et leur re.et, avec les lisières, avec ce qui se voit et ce qui se devine, avec ce qui était là avant que nous regardions, avec ce qui sera après. Auvent qui souffle, aux feuillages ténus qui frissonnent, à la pierre posée comme un repère, on pressent un évènement, on lit le présage de quelque chose, mais quoi ? (…) Peindre aujourd’hui comme le conçoit et le fait François Priser, c’est raconter l’histoire de la peinture, c’est aussi une manière de comprendre cet art si ancien et mystérieux. On dispose des thèmes, on travaille les variations. On compose avec, comme cela se dit quand on doit faire des compromis. Mais si certains compromis sont des renoncements, composer avec ceux qui nous ont précédé n’est pas leur laisser le terrain, abandonner toute initiative, c’est s’emparer d’une idée de la peinture pour se l ‘approprier. Si possible passer les frontières, abolir les barrières. Les barrières sont là pour donner l’équilibre, pour marquer la limite que le spectateur franchira. IL est venu pour aller plus loin que ce qu’on lui propose de regarder. L’horizon est sans limite pour qui l’imagine. C’est pourquoi, aussi, l’arabesque et les cercles qui happent son regard l’entraîne vers un vide qu’il comblera, ou dans lequel il s’enfouira, oubliera.

Norbert Czarny /Les eaux, le vent, les heures  / 17h59, Abbatiale Saint-Ouen, Rouen / 2013

Exposition au Sénat

Dans sa plus récente exposition au Sénat (septembre 2019), T. Blaise dans son introduction au catalogue résume parfaitement l’itinéraire du peintre. « Reconnu comme une figure singulière de la scène artistique française, François Priser n’a cessé de montrer tout au long de sa longue carrière son étonnante faculté de se renouveler et sa volonté d’élargir et d’approfondir une œuvre protéiforme qui lui est propre et qui échappe quelque peu aux critères d’évaluation et de classification en usage.
Depuis les années 80 il revendique une rupture définitive avec la distinction abstraction figuration sous l’influence assumée d’artiste comme Sigmar Polke et Gerhard RIchter qu’il eut l’occasion de rencontrer au cours de ses études. Né en 1954 à Yvetôt en Haute-Normandie (« qui vaut bien Constantinople », si l’on en croit Flaubert) François Priser est peintre mais aussi écrivain et scénographe. Son œuvre marquée par les notions de Temps et de Métamorphoses, est imprégnée de littérature et de philosophie mais c’est toujours sans ostentation, avec élégance et simplicité que le peintre convoque à sa table des opérations la tradition de l’histoire de la peinture. » (…)
Priser n’est pas dans la représentation des choses ; c’est à travers les œuvres elles-mêmes qu’il voit le monde et le peint à son tour : l’œil peint. Il aime mettre pour ainsi dire la représentation en abîme. Il a plus que tout le goût de voir. C’est pour mieux voir qu’il peint.Dans cette manière de rétrospective, le choix est fait de montrer à Peyrehorade plusieurs aspects distincts de son travail de ces quarante dernières années : d’abord les œuvres qu’on qualifiera « d’historiques » c’est à dire les toiles des années 80 qui furent les premières à rejoindre la collection de Jean-Jacques Lesgourgues, pour l’essentiel des œuvres sur goudron, de formats conséquents, constituées d’éléments géométriques abstraits qui font invariablement penser à des éléments d’architecture et des fragments de mosaïques, de pavements, d’azuleros, dont il affectionne de trouver les traces dans les civilisations les plus anciennes. Ces peintures dénotent déjà son goût pour les systèmes de composition, pour les matières riches et singulières, vibratiles et denses et dévoilent, en corollaire, l’intérêt jamais démenti qu’il porte à la notion de Temps, notion sur laquelle il s’est souvent expliqué, sa « grande a.aire » comme il le dit lui-même. Le deuxième volet de cette sélection consiste en l’exposition d’une suite de portraits d’artistes exécutés pour honorer une commande de Jean-Jacques Lesgourgues entre 1999 et 2000. Cette suite comprend les portraits de Picasso, Cézanne, Matisse, Giacometti, Zadkine, Brancusi, Soulages, Viallat, César, Dubu.et et l’autoportrait de Priser lui-même.

Jean-Claude Thévenin / L’œil peint, QUASAR -Regard en Atelier. Peyrehorade / 2022